• Mon perds

    "Tu es la seule à avoir eu une fessée".

    Cette phrase tourne dans ma tête depuis que je l'ai entendue lundi soir. 

    J'ai beau lui avoir répondu "Pas qu'une, tu as la mémoire courte", je ne cesse d'y repenser.

    Et si j'avais tout inventé ? Et si j'avais déformé la réalité ?

    Je n'ai aucun bon souvenir de ma jeune enfance avec lui, alors mon cerveau s'est-il peut-être trop focalisé sur les mauvais pour les cristalliser et les accentuer.

    Je me rappelle des fessées, pas une DES, et pourtant si je dois donner des exemples il ne me vient que cette "raclée" reçue à environ 5 ou 6 ans. 

    Je ne sais plus ce que j'avais fait. Je me rappelle juste avoir été allongée sur ses genoux et avoir reçu plusieurs fessées d'affilé. La seule chose ayant arrêté ce moment de folie étant une peluche que je tenais dans la main et qui répétait chaque son qu'elle entendait.

    Elle avait répété le bruit des coups et des cris et ça l'avait fait rire alors il s'était arrêté. 

    Je ne lui en ai pas parlé, je ne sais pas si il s'en souvient. Peut-être ai-je trop peur qu'il me dise qu'il ne s'en rappelle pas.

    Je me souviens également des gants de toilette d'eau glacée reçus en plein visage ou de la douche froide directement projetée sur mon visage. 

    Mais j'étais "une enfant difficile", la plus difficile des trois ai-je souvent entendu, ou imaginé ?

    Quand j'ai évoqué les gants de toilette il a souri, ça n'était rien de bien méchant apparemment et pourtant je m'en rappelle si fortement.

    Au point que pendant des années en primaire j'avais cessé de me laver, je ne fais le rapprochement que maintenant d'ailleurs. 

    Au point que quand Babycool ou Babyglu sont tellement pris dans une colère et que je leur applique de l'eau fraîche à la main sur le visage pour les aider à s'apaiser, je me demande toujours si ça n'est pas de la maltraitance.

    Au point que je déteste utiliser un gant de toilette et que je privilégie l'usage de mes mains pour la toilette.

    Mais "ça n'était pas bien méchant".

     

    Je me souviens aussi de l'absence.

    Mes parents ont divorcés quand j'avais 8 ans et demi mais je n'ai pour autant aucun souvenir de couple parental.

    Enfin si, je me souviens que quand ma mère s'est gravement brûlée mon frère a du aller chercher mon père au tennis. Il avait alors jeté sa raquette violemment au sol. 

    Je n'étais pas présente, on me l'a raconté, et j'avoue que je n'ai jamais vraiment su si il avait été en colère d'avoir été interrompu ou si il s'était inquiété pour ma mère.

    Ce qui est sur c'est que j'ai une profonde aversion pour le tennis et Roland Garros ! 

    Une aversion si profonde que j'ai même du mal à utiliser des balles de tennis pour laver les doudounes comme c'est souvent recommandé.

     

    Et je me souviens de cette dispute qu'ils ont eu. J'en ignore encore le sujet. Je sais juste que j'étais dans le couloir et j'ai vu mon père pousser ma mère qui est alors tombée à la renverse.

    Il me semble que mon frère m'avait retenue pour que je n'intervienne pas mais je n'en suis pas certaine. 

    Ce sont les seuls souvenirs que j'ai de l'époque où mes parents vivaient ensemble.

     

    Enfin, non pas tout à fait, je visualise également une fois où j'avais arrosé mon frère avec le tuyau d'arrosage et que j'avais retourné le tuyau contre mon père en lui disant "T'en veux aussi ?".

    Ce souvenir qu'il m'a raconté une fois et que j'ai visionné dans ma tête comme un film que j'aurais vu, et non vécu finalement. 

     

    Le reste ça n'est que du ressenti et c'est probablement ce qu'il y a de plus difficile à occulter.

     

    Je sais qu'il a semé les graines de la violence qui est en moi, qu'il fait parti des personnes qui ont terrorisé la petite fille qui reste en moi. 

    Cette petite fille qui panique et se braque dès que ses fils la menacent avec leurs doigts ou une minuscule arme en Lego.

    Je sais aussi qu'il fait parti des raisons pour lesquelles j'ai longtemps pensé qu'un père n'était pas un élément indispensable pour un enfant.

    Que c'est, en parti toujours, à cause de lui que j'ai parfois eu des comportements à risque entre 18 et 20 ans. Cherchant le réconfort et la sécurité que je n'avais pas connus.

    Je sais que je ne serai jamais totalement à l'aise en sa compagnie mais que je m'y accroche car je n'ai plus que ce "parent".

     

    Et depuis lundi je sens que la petite fille est bel et bien toujours là et toujours effrayée par cet homme.

    Je l'ai entendu hausser le ton sur Big Brother et c'était lui, ce père que j'ai connu, si loin de l'image de l'homme sympathique et sociable qu'il donne aux autres.

    Et, bien que Big Brother soit très difficile ces derniers temps, je déteste l'entendre s'adresser à lui de la sorte et intervenir quand je lui parle. 

    Mais je suis incapable de le lui dire car sa petite fille détourne le regard et baisse la tête en reconnaissant cette voix...

    Je préciserai juste que je n'ai pas cherché le jeu de mots dans le titre de l'article, c'est bel et bien ce que j'avais écrit "mon perds"...

    Mon perds

    Crédit Photo

     

    « Une (trop) jeune étoile est néeVotre fils ne va pas bien »

  • Commentaires

    1
    Jeudi 31 Août 2017 à 08:26

    J'ai été très émue en vous lisant !
    Vous décrivez là une enfant maltraitée.
    Et un parent maltraitant !
    Dans notre société, il est interdit de penser du mal de nos parents.
    On se demande bien pourquoi à vous lire... Je me suis permise de ne pas l'aimer ce père que je ne connais pas mais qui vous a si mal menée !
    Votre peine et votre douleur me sont arrivées en plein coeur !
    Non ! on ne doit pas traiter un enfant ainsi ! jamais de la vie !
    La maltraitance commence dès le premier manque de respect. Qu'il soit physique ou psychologique.
     
    Je vous souhaite des bonheurs à n'en plus finir pour compenser tout cela.
    Ne vous interdisez plus de vivre et ne vous obligez plus (non plus !) à supporter ce qui ne doit pas l'être sous couvert de lien parental. Le lien ne peut exister dans des conditions pareilles ! curieux lien non ? lien toxique, donc, destructeur.

      • Jeudi 31 Août 2017 à 08:58

        Merci beaucoup pour votre message. Ce que vous dites me fait penser au livre d'Alice Miller, "Notre corps ne ment jamais" car c'est exactement ce qu'elle explique, que nous sommes élevés avec le 4ième commandement qui est d'honorer ses parents et que c'est donc très difficile d'en vouloir réellement à nos parents sans culpabiliser. 

        Et merci pour vos encouragements.

    2
    Jeudi 31 Août 2017 à 09:51

    Je suis une grande adepte d'Alice Miller ;)
    Prenez soin de vous !
    Et ne laissez plus personne agir ainsi.yes

      • Jeudi 31 Août 2017 à 11:27

        Merci beaucoup, encore une fois. Je n'ai lu qu'un de ses livres mais je pense me mettre aux autres ;-)

    3
    Sandrine
    Jeudi 31 Août 2017 à 10:49

    Je me retrouve beaucoup dans votre texte, vos sentiments, vos souvenirs... il faut réussir à avancer et l'important c'est déjà d'en prendre conscience. Une femme m'a dit un jour, maintenant avancez,  vous avez votre propre famille et depuis 4 mois que mon bébé est là, j'en prends conscience! 

    bon courage! 

      • Jeudi 31 Août 2017 à 11:27

        Merci pour votre message, profitez bien de votre propre famille maintenant ;-)

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